"Art is love made public" Bilan : Sense8 - saison 2

Début mai, Netflix a diffusé la seconde saison d'une de ses séries phares, Sense8, que j'avais commencé l'année dernière sans trop rien en attendre. Très vite, elle est devenue l'une de mes séries favorites : les personnages sont tous plus attachants et intéressants les uns que les autres, les thèmes abordés sont beaux et font chaud au cœur, la série fait la promotion de la tolérance, de l'amour, de l'entraide, et surtout de l'acceptation - de soi, et des autres. 

J'ai eu la chance de pouvoir visionner le premier épisode de cette seconde saison un peu en avance et dans une salle de cinéma à l'occasion du festival Séries Mania qui se tenait à Paris en avril. Quelle claque ! 

Le reste de la saison est similaire : les arcs narratifs propres à chaque personnages se développent, avec toujours plus de scènes "chorales" où nos huit héros s'entraident jours après jours, jusqu'à devenir une de ses familles qui peuvent sembler un peu bancales et atypiques mais auxquelles on aimerait appartenir. Parallèlement, l'intrigue avec Whisper s'épaissit, on rencontre des membres d'autres clusters qui viennent élargir le champ des possibles au sein de cet univers. 

Je peux comprendre la frustration de certains : on n'a pas l'impression que cela avance vite, et peut-être en effet que les arcs de certains personnages auraient parfois pu être sacrifiés au profit de celui là, qui implique des enjeux plus importants qui donne plus de sens et un but à nos personnages. Mais c'est l'humain dans sa multiplicité et sa complexité qui est au coeur de la série (l'homo sensorium, certes), et cette dimension intime, où le développement de la vie de chaque personnage est au centre des intrigues me semble donc normal et pas le moins du monde inintéressant. Les personnages secondaires sont tous géniaux et on s'attache à eux autant qu'aux sensates que ce soit Dani, Hernando, ou Bug. La série offre toujours de grandes scènes : on rit, on pleure, on passe par toutes les émotions possibles. 

Toutes les scènes avec les huit personnages m'ont fait particulièrement chaud au cœur, et s'il ne fallait en choisir qu'une (car il y en a tellement), je choisirais la scène d'ouverture du premier épisode, qui fait se croiser Lito et Capheus pour un discours qui m'a retournée, donnant déjà le ton. Car c'est là aussi l'une des grandes forces de la série : les beaux discours qui te remuent jusqu'au fond de ton âme, qui trouvent un écho dans ton coeur, au point que tu ressors de ton visionnage avec l'envie irrépressible de croire désespérément que ce monde peut être beau et bon, tolérant et solidaire. Comme le dit Capheus, "It takes courage to remember that this is a world where our dreams do come true". Cette série me donne cette force. 

Le retour à la réalité est (très) dur. Mais c'est pour cela que je ne pardonnerais pas à Netflix de vouloir nous enlever cette série après seulement deux saisons : nous en avons besoin. Oui, j'ai besoin de voir des gens s'aimer comme ils le veulent, se battre pour être respecté, s’entraider et s'unir malgré les différences, et ce sans même s'être rencontré physiquement. De plus, ces personnages, cette famille, méritent une fin clôturée, digne d'eux et de l'amour qu'ils se portent. En bref : #RENEWSENSE8 et souvenez vous : 

"Nothing good ever happens when people care more about our differences than the things we share in common" 

Game of Thrones : bilan de saison

Si vous n'avez pas vu l'intégralité de la sixième saison de Game of Thrones ou si vous souhaitez garder intacte votre innocence concernant les livres de George RR Martin (ou si vous n'avez pas fini de les lire), passez votre chemin ! Bilan, petit point sur les théories et top 6 des meilleurs moments de la saison sont au programme, mêlant spoilers des derniers épisodes et des livres. Vous êtes prévenus ! Bonne lecture, petits corbeaux. 

Bilan

Cette saison, l’histoire avance…à grands pas ! Peut-être même un peu trop vite : on est frustré par la quasi absence des nombreux personnages secondaires auxquels on s’était habitués et qui avaient jusque là toujours eu du temps de présence, assez pour avoir leurs propres arcs narratifs, qui étaient développés et évoluaient. Je veux parler de Sam, Brienne, Pod, …même Cersei a été délaissée, avec Margaery et son frère, avant l’épisode final – altérant d’ailleurs peut-être l’impact de la mort des enfants Tyrell...Seul petit point de consolation : Ser Davos a enfin eu le temps et la place de choix qu'il méritait. 

De même, le temps semble s’être arrêté à certains endroits, qui ont été totalement délaissés : Dorne, d’abord, après le putsch des Sand Snakes aidés par Ellaria, et puis le Mur, qui a disparu une fois que Jon en est parti, comme si les éléments pourtant majeurs qui s’y jouent (il y a un peu des glaçons maléfiques qui s’apprêtent à leur tomber dessus) n’étaient plus importants sans la présence d’un personnage principal. Espérons que l'erreur sera rectifiée la saison prochaine, car qui ne veut pas revoir Dolorous Edd et savoir comment il se débrouille en tant que Lord Commander ? Etant donné la dernière position connue de Bran, il semblerait que l'espoir soit permis.

"Bye bitches j'vais pécho Gendry"

"La prochaine fois gare toi un peu moins loin quand même steuplé" 

"Alors comme ça on s'permet de faire de la merde avec moi ??"

Cette saison a également été marquée par le couronnement et la prise de pouvoir de ses personnages féminins…Après avoir molestée et violenté ses personnages féminins, la série semble décidée à leur donner tout pouvoirs…ou presque. Les épreuves qu’elles ont traversés semblaient donc destinée à asseoir leur force et leur courage (...*toussote*) : Arya, Yara/Asha, Cersei, Daenerys (bon ça c’est pas nouveau) semblent avoir pris leur envol vers une vie où elles dirigent. Mais la disparition de Brienne (la malédiction de la barque probablement, ces engins sont plus mortels que le feu grégois), et le non-couronnement de Sansa, entre autre, viennent un peu ternir ce constat, de même que la constante sexualisation des personnages et le recours à la violence sexuelle pour faire avancer leurs arcs narratifs. Le Nord est une région sauvage et ils auront sûrement du mal à accepter qu’une femme soit aux commandes, mais c’est assez frustrant quand on voit le nombre de femmes fortes et capables que cette région fourni, nourrissant ainsi l’histoire. De plus, leur couronnement, littéral ou non, n’excuse pas toutes les offenses passées, mais je suppose qu’il vaut mieux tard que jamais. La série restera toujours problématique sur cette question et sur bien d’autres. 

Daenerys a toujours été favorisée mais nous sommes, dans cette saison, à l’apogée de ce traitement de faveur. Comme toujours, elle a les plus belles musiques, des moments de gloire parfois inutiles (clairement, on nous fera pas croire que Tonton Drogon attendait sagement, garé pas loin, juste pour qu’elle puisse faire un de ses speechs de motivation alors que la horde de Dothraki était déjà au taquet pour la suivre – et mourir pour elle, un peu comme tout le monde, en fait), et tout semble lui sourire. En effet, après avoir passé cinq saisons à nous montrer combien elle est forte avec ses dragons et son armée, elle n’avait pourtant jamais avancé dans sa quête pour Westeros, et voilà qu’en une saison, elle se retrouve entourée et soutenue par la moitié des Maisons importantes, et, dans le dernier plan du season finale, est en route pour King’s Landing après être passée par Dorne, téléportant son armée vers la capitale (« mais c’est les dragons qui les ont tirés blablabla »). Toutefois, il y a bien une chose intéressante de son côté : au fil des épisodes, il semble que les scénaristes aient voulu introduire l’idée que peut-être qu’après tout, Dany n’aurait pas totalement échappé à la folie de son père, le Roi Fou (et de son frère Viserys, rappelez vous…). Peut-être que son personnage sera donc plus nuancé et nous offrira une nouvelle facette par la suite. 

L’un des gros gâchis de la saison s’incarne dans les loups-garous, tués les uns après les autres…C’est l’un des gros problèmes depuis le début de la série : ils n’ont pas le rôle qu’ils méritent…et qui est le leur ! Petit rappel : les loups sont toujours vivants et accompagnent toujours les Stark dans les livres (sauf Lady, rest in peace). Au delà de cela, ce qu’il faut comprendre c’est que les loups-garous ne sont pas juste des animaux de compagnies assez impressionnants. Certes ce ne sont pas des dragons qui peuvent voler et permettre à leur propriétaire des speechs inspirants (bim), mais ils ont leur propre utilité. Chaque Stark est, comme Bran, un warg et possède donc la faculté de partager l’esprit de son loup. Par le biais de leurs "rêves de loups", ils ressentent la présence des autres, les loups sont leur lien, même s’ils se trouvent à des endroits opposés du monde. Le fait que la série soit totalement passé à côté de cela est toujours aussi décevant et frustrant. 

Le sacrifice de Summer peut se comprendre, même s’il semble plutôt inutile, mais la mort de Shaggydog est incompréhensible : il est le plus sauvage et le plus meurtrier de la meute, comment donc aurait-il pu être attrapé, et de surplus, tué ? (On peut dire pareil de Rickon et Osha, je m’en arrache encore les cheveux). Ghost semble donc être le seul rescapé et...être capable de devenir invisible quand cela arrange les scénaristes : depuis la résurrection de son maître, il a tout simplement disparu ! Sa présence n’aurait-elle pas ajouté du poids au couronnement de Jon Snow ? THE WHITE WOLF ! C’est pourtant pas sorti de nul part comme nom ! De même, il semble improbable que l’on revoit Nymeria, qui, dans les livres, conduit une meute de loups à travers Westeros et tire Catelyn Stark de la rivière où elle reposait, lui permettant ainsi de devenir, par la suite, Lady Stoneheart…Du gâchis, je vous dis. 

La musique, les costumes, les acteurs et la réalisation sont toujours au top (en particulier pour les épisodes 9 et 10 côté réalisation). En soit, la saison a été très bonne, toujours agréable à regarder mais contient beaucoup trop de facilités et de raccourcis pour que ce soit totalement crédible. Elle me fait un peu l’effet d’une fan fiction, certes rondement menée et très agréable à suivre, mais dans laquelle on peine à percevoir ce qui constitue l’essence de cet univers et de la série à ses débuts. Les mystères, lentement distillés au fil des saisons se résolvent tout seul, prévisibles à souhait, nous empêchant de vibrer autant que nous l’aurions fait lors des autres saisons. 

Ainsi le prix à payer pour avancer dans l’histoire est fort. Il est trop tard, mais peut-être aurait-il fallu anticiper le fait d'avoir dépassé les livres, et avoir toujours mené la série sur un rythme permettant d'avancer sans bâcler (comment peut-on finir en beauté une grande saga épique en treize épisodes ? J'espère avoir tort, mais cela semble précipité...). Peut-être faudrait-il alors trouver un nouvel équilibre, pourquoi pas étendre la durée des épisodes pour permettre de développer des intrigues sans en donner l’issue tout de suite. Un peu plus d’efforts dans l’écriture permettrait d’allier le plaisir à la crédibilité. 

Le point sur les théories 

CleganeBowl

"The Hound is dead. Sandor Clegane is at rest." – The Elder Brother (A Feast For Crows)

Le CleganeBowl est une théorie de fan qui a vu le jour d’après les événements contés dans A Feast For Crows le quatrième livre de la saga. Auparavant, Sandor Clegane a été laissé pour mort au bord d’une route après un combat qui a mal tourné (un peu comme dans la série, sauf que Brienne était loin d’être présente). Une tombe a été creusée…mais la théorie prend racine dans la croyance que le Limier est bel et bien toujours vivant, ayant été récupéré et soigné par des religieux (il serait le mystérieux creuseur de tombe que Brienne aperçoit dans le monastère où elle s'arrête, qui présente les mêmes blessures que Sandor, le même cheval, et qui se cache le visage…). La citation d’un peu plus haut voudrait donc juste dire qu’il a renoncé à son identité du Limier et qu’il a choisi une nouvelle vie, plus pieuse et paisible.

Sandor Clegane serait alors du côté de la Foi. Et, là où nous en sommes restés dans les livres, Cersei Lannister attend son procès, et compte demander le désormais classique « trial by combat » et utiliser la Montagne-Zombie (ou Ser Robert Strong parce que oui chez GRRM on aime cacher l’obvious avec de nouveaux noms et c’est trop classe). Le CleganeBowl représente donc l’affrontement des deux frères au passé chargé (petit rappel : Sandor vit pour tuer son frère, c’est beau la famille), lors de ce procès, Gregor représentant Cersei et Sandor la Foi. Dans la série, nous sommes maintenant sûrs que eh bien…cela n’aura jamais lieu, comme le procès (haha…too soon).

"Alors on attend pas Patrick ?"

Impact : Pour ce qui est des livres, l’avenir nous le dira. Chez HBO, Sandor ne semble pas prêt d’affronter son frère…en tout cas pas pour cette occasion. Mais après tout, ils sont tout les deux bel et bien vivants (ou presque, je suppose qu’il faudrait y réfléchir à deux fois pour Gregor…), et semblent aller dans des directions opposés. Si visiblement Sandor ne va pas rester du coté de la Foi, il est bien parti pour s’allier à la Fraternité Sans Bannières, qui peut potentiellement être confrontée aux soldats de la Reine. On ne peut donc pas dire que le CleganeBowl soit entièrement compromis…En tout cas son essence même changerait, mais un affrontement peut toujours survenir.  

Frey Pie

"The best pie you have ever tasted, my lords. Wash it down with Arbor gold and savor every bite. I know I shall." – Wyman Manderly aux Boltons (A Dance With Dragons)

Dans le dernier tome en date de la grande saga de GRRM, une fausse Arya Stark (Jeyne Poole, l’amie d’enfance de Sansa) se voit marier à Ramsey Bolton. Tous les vassaux du Nord sont attendus pour la cérémonie, afin de prouver leur allégeance aux Boltons. Wyman Manderly amène trois grandes tourtes de viandes. La théorie veut qu’il s’agisse en fait d’une tourte…aux Freys (trois Freys étaient postés à White Harbor, la demeure des Manderly, pour s’assurer de leur loyauté). Lors de ce mariage, le même Manderly insiste pour que soit chantée la chanson du « Rat Cook ». Dans la série, c’est Bran et les Reed qui en parlent : il s’agissait d’un cuisinier malveillant qui a tué le fils du roi et lui a servi en guise de dîner, sous forme de tourte…

Cette théorie n’a pas été confirmée, même si elle est très probable. Ici, c’est donc Arya qui prend la place de Wyman Manderly, et qui en profite au passage pour rayer un nouveau nom de sa liste.

Impact : En allant un peu plus loin, tout laisse à penser que la jeune Stark puisse prendre la place qui est celle de Lady Stoneheart dans les livres : une entité vengeresse et mortelle pour tout ceux ayant trahis et causés du tord à la maison Stark et à ses fidèles.

Cette scène pose également une question : pourquoi, alors qu’il était à portée de main, Arya n’en a-t-elle pas profité pour tuer Jaime, elle qui hait les Lannister ? Il n’a jamais été clairement sur sa liste, certes, mais on pourrait penser que cela aurait constitué une occasion en or pour se venger de Cersei... 

L’affaire Coldhands

“A monster,” Bran said.The ranger looked at Bran as if the rest of them did not exist.“Your monster, Brandon Stark”. – A Dance With Dragons

      Dans les livres, Samwell Tarly comme Bran Stark, fait au-delà du Mur, la connaissance de Coldhands, un homme mystérieux, qui cache son visage dans une écharpe, complétée d’un manteau de la Garde de Nuit, qui ne mange pas, ne respire pas, bref, qui présente beaucoup de ressemblances avec les Autres sans vraiment en être un. Il va sauver la vie de Sam, qu’il appelle d’ailleurs « frère », puis accompagner Bran, Hodor et les Reed vers la Corneille à Trois Yeux.

Benjen Face-de-Crumble Stark

            Tous les fans se sont, à un moment, dit qu’il devait s’agir de Benjen Stark, l’oncle qui a disparu mystérieusement pour ne jamais réapparaître, alors que ses camarades ont visiblement été attaqués par des Whites. Cependant, GRRM a déclaré qu’il ne s’agissait pas de lui, et Leaf déclare qu’il a été tué il y a très longtemps, ce qui semble écarter Benjen des candidats probables. La série a donc choisi d’ignorer tout cela pour faire revenir le First Ranger d’entre les presque-morts.

Impact : visiblement pas très grand ? Il ne peut retourner de l’autre côté du Mur, et son importance ne devrait être révélée que lors de la grande bataille qui s’annonce contre le Roi de la Nuit. Cependant cela pourrait faire du bien au moral de Jon et des autres membres de la Garde de Nuit apprenaient sa survie, si Bran est enclin à partager l’information. 

La prédiction de Maggy la Grenouille

"Cersei: When will I wed the prince?

Maggy: Never. You will wed the king. 
Maggy: Aye. Queen you shall be... until there comes another, younger and more beautiful, to cast you down and take all that you hold dear. 

Cersei: I will be queen, though?

Cersei: Will the king and I have children? Maggy: Oh, aye. Six-and-ten for him, and three for you. Gold shall be their crowns and gold their shrouds, she said. And when your tears have drowned you, the valonqar shall wrap his hands about your pale white throat and choke the life from you. – A Feast For Crows

            La première partie se réfère bien évidemment au mariage de Cersei et Robert même si cette dernière pensait alors qu’il s’agissait de Rhaegar Targaryen, et la (presque) dernière est bel et bien devenue réalité, avec la mort des trois enfants de Cersei (même s’il n’y a pas eu tellement de larmes pour le trépas du petit dernier, un point que l’on peut contester, car cela va à l’encontre du personnage de Cersei, mais bon…).

Cependant, dans les livres, l’identité de la Reine qui viendrait la détrôner peut-être multiple : s’agit-il de Margaery, de Daenerys, de Sansa ? Dans la série, il me semble que cela est plutôt clair (malheureusement ?), et plutôt littéral, avec le couronnement en bonne et dû forme de Cersei et la venue super-rapide de Daenerys à Westeros. L’intégralité de la prophétie semble donc valable et devient réelle.

On peut entendre la prophétie au tout début de la saison cinq, mais la série a choisi de passer sous silence la toute dernière partie, concernant le valonqar qui tuera Cersei (le passage précis qui, dans les livres, lui donne des cauchemars et lui fait craindre Tyrion, la rendant paranoïaque…ah ce que j’aurais aimé voir ça dans la série !). 

Valonqar est un mot en Valyrien qui signifie « petit frère ». Son identité a été discutée par les fans, et la liste est plutôt longue : Tyrion, Jaime, Aegon, Daenerys, Loras, un des Stark, Tommen, Sandor Clegane, une des Sand Snakes, Brienne…Pour moi, il n’y a que deux options qui soient vraiment dignes d’être prises en compte : Tyrion, ou Jaime. Un bébé Stark ou Aegon, le jeune frère de Dany, serait aussi plausible, mais cela n’aurait pas dû tout la même puissance.

Il est d’autant plus dommage d’avoir occulté cette partie de la prophétie que ces deux options semblent en bonne voie pour se réaliser : Jaime est né après Cersei, il est donc le plus jeune des deux. Dans les livres, après le procès de Tyrion, leur relation se détériore et Jaime choisi de s’éloigner d’elle (voir mon article précédent sur ce point là). Chez HBO, cela a mis plus de temps mais le dernier regard qu’il lui lance, la voyant du haut de son trône, laisse à penser qu’il se rend compte de sa « folie » et va ainsi ENFIN retrouver sa storyline, faisant de lui un valonqar plus que potentiel car après tout, Cersei semble être la digne héritière du Roi Fou, et Jaime l’a tué…D’un autre côté nous avons Tyrion, en route pour Westeros avec Daenerys, et donc en route pour sa vengeance ?

Impact : tout laisse à penser que les enfants Lannister seront voués à se retrouver, pour le meilleur et pour le pire, dans la suite de Game of Thrones. Peut-être que l’identité du valonqar sera confirmée la saison prochaine, mais, avec la réalisation quasi totale de la prophétie pour le moment, ce qui est sûr est que la fin est proche pour Cersei Lannister. 

R+L = J  

Il s’agit certainement de la plus vieille - et la plus importante - des théorie des lecteurs d’ASOIAF. La véritable parenté de Jon Snow a toujours beaucoup portée à débat, et à réflexion. Dès que j’ai eu fini de lire les livres, j’ai adhéré à cette théorie, la plus censée et celle bénéficiant du plus de preuves.En effet, Ned Stark retrouve sa sœur, qui avait été enlevée par Rhaegar Targaryen, à la Tour de la Joie. Son enlèvement à provoqué la guerre et, indirectement la chute de la maison des dragons, anéantis par la jalousie de Robert Baratheon. En effet, dans le flash back de Ned (des livres), les symptômes dont semble souffrir Lyanna sur son lit de mort ressemblent à une grossesse qui à mal tournée, point confirmé par la série. Le mystère qui reste encore aujourd’hui entier est celui de la relation entre Lyanna et Rhaegar : leur amour était-il réciproque ? Jon est-il un enfant né d’une relation interdite mais saine ou d’un viol ? Nous ne le saurons probablement jamais.

La faille dans la représentation de cette vision dans la série est le fait que Bran n’entend pas ce que Lyanna murmure à Ned. Evidemment, les lecteurs ou les spectateurs ayant lu cette théorie auront pu deviner le contenu de ces messes basse : il est le rejeton d’une Stark, certes, mais aussi d’un Targaryen, et Robert hais les Dragons, donc sa parenté doit donc rester secrète pour cette raison. Cela est d’autant plus compliqué que ce souvenir a été teasé cinq épisodes plus tôt, sans suites jusqu’au season finale, perdant au passage de sa force.

Impact : quel impact cette révélation pourra t-elle avoir pour l’avenir de Westeros…et de Jon ? Tout d’abord, au vu des personnages présents dans la série (ou plutôt, de l’absence d’Howland Reed, le père de Meera et Jojen, seul autre survivant de la Tour de la Joie) il n’y a aucun témoin, hormis Bran, un warg/la Corneille à Trois Yeux, mais un adolescent handicapé dont on peut deviner que personne ne voudra croire la parole, sans la présence d’un autre témoignage. Or, si personne n’y croit, comment cela peut-il avoir un réel impact ?

De plus, même si Jon est donc de sang noble et même royal, il reste un bâtard, conçu hors du mariage, peut-être même né d’un viol. Un bâtard noble, mais un bâtard tout de même. Il apparaît donc que même en tant que fils du Prince Rhaegar, il aura toujours moins de légitimité que sa tante Daenerys…Si personne ne peut donner la preuve d’un amour et d’un mariage secret entre Lyanna et Rhaegar, il ne possède pas plus de pouvoir que, par exemple, Gendry, autre bâtard royal…Le développement de cette intrigue dans la prochaine saison sera donc à suivre avec attention. 

Jon Snow = Azor Ahai

Tout d’abord : qui est Azor Ahai ou Le Prince qui Fut Promis ? Un guerrier revenu à la vie, de la fumée et du sel (comme un cochon, big up Renly), qui manie l’épée enflammée « Lightbringer » (il a sacrifié l’amour de sa vie pour obtenir cette épée) afin de défendre le monde contre les Autres (qui sont les ennemis jurés de R’hllor). Il est également dit qu’il serait issu de la lignée du Prince Aerys et de la princesse Rhaella Targaryen.

Beaucoup de candidats ont été envisagés : tout d’abord, évidemment, Stannis Baratheon. Si son sort est loin d’être scellé dans les livres, il est définitivement exclu de la compétition dans la série (et puis, on sait tous que son coup de l’épée enflammée c’est du pipeau, Thoros de Myr nous l’a déjà fait, hein). 

Le second candidat, tout désigné est…Daenerys. Elle possède le sang du dragon (celui d’Aerys !!), qui, lui confère certains « pouvoirs ». Dans les livres, c’est mestre Aemon lui-même qui confie à Sam qu’elle EST Azor Ahai, et que la prophétie utilise le mot dragon, qui ne sont ni mâle ni femelle, et il n’est donc pas exclu que le Prince soit une femme (oui, bon, là y'a une faille).

« Jon was armored in blackice, but his blade burned red in his fist. As the dead men reached the top of the Wall, he sent them down to die again.” – A Dance of Dragons (Jon, scène de rêve)

Cependant, pour moi comme pour beaucoup, le candidat tout désigné est en effet Jon Snow. Tout d’abord, avec la confirmation de sa parenté, il est lui aussi héritier d’Aerys et Rhaella. Ensuite, dans A Dance With Dragons, sa plaie fume (hashtag p’tit barbuc au bord de la mort avec mes bros). Dans le même livre, il fait également un rêve où il se voit combattre avec une épée rougeoyante/flamboyante dans les mains (alors là, ça devient obvious, George…). Enfin, alors que Mélisandre cherche dans le feu à trouver Azor Ahai et donc, pour elle, Stannis, elle ne parvient à voir que Jon.

Dans la série, avec sa résurrection et le fait qu’il semble en effet que Jon soit voué à combattre les Autres (il connaît la menace, l’a déjà combattu et a survécu), le doute ne peut plus être permis : Jon EST Azor Ahai (il a pas de dragons mais il a de beaux cheveux et il n’est pas mort, on prend). Les showrunners étaient au courant et c’est donc bel et bien un gros spoiler des livres à venir que cette saison nous a apporté.

Impact : Jon va devoir à combattre le Roi Glaçon et sa suite alors qu’il vient juste de reprendre Winterfell, si c’est pas triste ça. Espérons que Tata Dany et Tonton Drogon viennent filer un coup de main, quand même. 

Les 6 meilleurs moments

La réunion Sansa/Jon

Qui n’a pas versé une larme lorsque les portes de Castleblack se sont ouvertes sur Sansa, Brienne et Pod, et que Jon se précipite pour faire un câlin à sa demi-sœur perdue ? Après toutes les épreuves (inutiles ahem) subies par Sansa, il est réconfortant de savoir qu’elle peut maintenant compter sur des alliés de taille. De plus, de telles retrouvailles semblent impossibles dans A Song of Ice and Fire, où les Stark se croisent sans le savoir mais ne se retrouvent jamais, nous donnant envie de hurler devant notre livre.

The White Wolf

Dans les livres, Robb dit clairement qu’il aimerait que Jon lui succède s’il venait à mourir. Voir cela se réaliser dans la série a été un gros moment d’émotion, même si sa légitimité risque d’en prendre un coup, que ce soit avec Sansa ou le retour probable de Bran. Qui n’a pas repensé au moment de grâce de Robb Stark, the Young Wolf, revu Catelyn se rendre compte de ce que cela signifiait, son visage s’effaçant lentement remplacé par celui de Sansa. There will always be a Stark in Winterfell.

L’explosion du septuaire de Baelor et le couronnement de Cersei 

Oui, c’est un peu de la triche, mais les deux sont voués à devenir mythiques. La tension du premier, inévitable mais si tragique, où Cersei répare, à sa façon, ses erreurs passées, détruit le monstre qu’elle a créé…au risque d’en engendrer un encore plus monstrueux, car on peut imaginer le désir de vengeance de la Foi, des Tyrell et de tout ceux ayant eu un membre de leur famille dans le septuaire.

D’un autre côté, on ne peut s’empêcher de jubiler pour Cersei, si royale et gracieuse, dans un costume magnifique digne de la plus grande Reine des Ténèbres. Long live the queen (pas si long que ça a priori…). 

Hold the Door

L’un des plus beaux moments de tension (il y en a eu pas mal) et l’une des grandes révélations de cette saison. GRRM lui-même a confirmé la signification d’Hodor, même s’il a expliqué que cela serait révélé dans des conditions drastiquement différentes (on peut donc espérer qu’il survive encore un plus, hallelujah). 

Les retrouvailles de Jaime et Brienne 

Can you feel the love toniiiiiight

C’est mon côté shippeuse qui parle ici, car aucune relation n’est plus belle que celle de ces deux là, et j’avais hâte de les retrouver ensemble (leurs retrouvailles sont TRES TRES différentes dans le livre…ahem). Si la série nous offre des moments de joie que nous sommes sûrs de ne jamais retrouver dans les livres, autant en profiter. Leurs scènes étaient à la fois belles et déchirantes, comme toujours.

Le retour du Limier

Depuis que Rory McCann avait été aperçu sur le tournage, le doute sur son retour semblait être levé, mais cela reste un grand moment de cette saison, tout d’abord parce que quand l’épisode s’est lancé, on s’est demandé si ce n’était pas un épisode de La petite Chapelle dans la prairie, jusqu’au retour de Monsieur Poulet, qui nous laisse espérer des retrouvailles avec Arya…après tout, il est aussi sur sa liste…

Game of Thrones : retour de flamme ?

Cher petit corbeau qui passe par ici, si tu n'as pas vu les deux premiers épisodes de la saison 6, je te conseille de passer ton chemin et de revenir quand ce sera le cas. De même, si tu prévois de lire les merveilleux livres de GRRM (je conseille la VO si c'est possible), l'article qui suit contient des citations sorties de ces livres ainsi que la véritée vraie sur ce qui aurait dû se passer pour certains personnages selon ces mêmes livres. Si tu veux que le mystère reste entier pendant ta lecture, enregistre ce lien quelque part et reviens plus tard !

Lannister un jour Lannister toujours ? 

En ce début de saison, Jaime et Cersei se retrouvent, pour enterrer de nouveau un de leurs enfants. Entre temps, Cersei a connu une épreuve traumatisante face à toute la ville réunie pour la huer, la haïr plus que jamais. Certes, le meurtre de leur fille peut occulter ce qu'ils ont vécu entre temps, mais il aurait peut-être été judicieux de nous montrer la réaction de Jaime autrement qu'à travers son entretien avec le High Sparrow lors de l'épisode 2. 

Cela pour en venir au fait : on a le sentiment que finalement, le personnage de Jaime n'a pas évolué, comme on aurait pu le penser avec la merveilleuse troisième saison, mais qu'au contraire, il n'a cessé depuis de faire du sur-place. Quid de son chemin parcouru grâce, notamment, à sa relation avec Brienne. Quid aussi de la confession de Tyrion juste avant son évasion sur les amants de Cersei (Lancel, les frères Potaunoir et Taena, notamment dans les livres, au moins Lancel dans la série), qui aura pour conséquence de finir d'effriter la relation des jumeaux incestueux.

Car en plus de son chemin personnel pour trouver la rédemption en tenant les promesses faites à Catelyn Stark (notamment celles de récupérer ses filles et ne plus jamais prendre les armes contre les Tully ou les Stark), Jaime entreprend un travail sur sa relation avec sa soeur. A son retour de captivité, il la dégoûte : il est devenu manchot, incomplet, il n'est plus son reflet exact, sa moitié parfaite. Un premier mur s'érige entre eux. 

Le deuxième mur est la perte de Joffrey (Jaime arrive juste après, dans les livres). Puis, au terme d'une discussion échaudée dans les cachots juste avant l'évasion de Tyrion,ce dernier parle à Jaime des amants de sa soeur. Cela va finir d'ancrer le doute dans l'esprit de Jaime : lui, n'aime qu'elle, mais Cersei l'aime t-elle vraiment ? Cela va amener à une prise de distance entre les deux Lannister, et va mener au départ de Jaime pour Riverrun, afin de rencontrer les derniers Tully qui mènent la vie dure aux Frey là-bas. Sur le chemin, il rencontrera son cousinet Lancel, qui lui fera part de ses péchés...boum, dernier mur (l'espoir est encore permis pour que cela arrive dans la série, d'ailleurs...). 

Nos deux tourteraux incestueux sont donc séparés. Et Cersei, qui vient d'être arrêtée par les Moineaux, a besoin de l'aide de son frère. Elle lui fait donc parvenir une lettre, disant ceci : 

"Come at once she said. Help me. Save me. I need you now as I have never needed you before. I love you. I love you. I love you. Come at once."

Ce qui est le plus intéressant selon moi et ce qui permet de comprendre le chemin parcouru par le personnage de Jaime, c'est sa réaction face à cette demande pressante, cette déclaration d'amour :

"Does my lord wish to answer ?" the maester asked, after a long silence.

A snowflakes landed on the letter. As it melted, the ink began to blur. Jaime rolled the parchment up again as tight as one hand would allow, and handed it to Peck. (son écuyer)

"No", he said. "Put this in the fire".

BIM dernier mur. Par ce geste Jaime enterre son amour pour Cersei. Il finit son évolution de guerrier amoureux transi et violent vers un homme qui a vécu beaucoup d'épreuves et en est ressorti mûri, plus fort et plus sage. Il est prêt a aller de l'avant et Cersei représente son passé. 

Voilà pourquoi il est difficile de pardonner à la série le manque d'évolution des personnages. Il est normal de ne pas pouvoir faire un copier/coller des livres, et de devoir parfois changer de direction. Mais encore faudrait-il que ces changements assurent une certaine cohérence, des évolutions pour les personnages et les intrigues, sinon la série ne fait pas son boulot. 

Sortir des magnifiques sentiers tracés par GRRM ressemble alors à une erreur de taille. Peut-être aurait-il fallu ne pas céder aux sirènes du succès et de l'argent pour assurer au public un plaisir continu, puis-qu’après tout les lecteurs ne sont pas les seuls à ressentir les manques. Les séries sont devenues un art, la télévision un médium synonyme de qualité (ce dont se targue d'ailleurs HBO), et il est donc un peu trop tard pour traiter son public comme des endives alors que ce public est devenu spécialiste et exigeant.

Le naufrage de Dorne

La saison dernière déjà, les lecteurs s’arrachaient les cheveux devant le massacre de l'arc narratif se déroulant à Dorne. Jaime là-bas ? Une histoire d'amour d'adolescents ? Des Sand Snakes hypersexualisées ? Une Ellaria vengeresse ? Pas d'Ariane et de Quentyn Martell ??? Bref, de quoi vraiment s'énerver sur les choix d'adaptation de D&D, les producteurs ainsi que de leurs scénariste. L'absence de GRRM se faisait plus que jamais ressentir. 

Après avoir détruit ces personnages et leur histoire, la séquence très violente de l'épisode 1 vient achever le massacre. On a l'impression que faute de savoir quoi faire de Dorne (car on n'a pas introduit les personnages importants pour son développement très important pour le futur de Westeros), ces meurtres successifs viennent enterrer cet arc : on ne sait plus quoi faire, allez un peu de sang et on remballe (ah et apparemment Obara et Nym peuvent voler ? Sinon il faudra nous expliquer comment, après être restées à quai elles peuvent avoir atterri dans le bâteau où se trouve Trystane qui par un heureux hasard ne se trouvait pas sur le même que Jaime et Myrcella...Parleras t-on de la disparition soudaine de Bronn ? Noyé en mer ? Il s'est perdu dans le bâteau ? Il est parti retrouvé Tyrion à la nage ?)

En plus d'être incohérente et un peu trop facile, cette séquence va à l'encontre du personnage d'Ellaria (qui est loin d'être le seul personnage victime des scénaristes qui les transforment au gré de leurs envies). Dans A Dance with Dragons, Cersei envoi à la famille Martell le corps supposé de Gregor Clegane. Ce qui donne lieu à une scène où la famille Martell et les huit Sand Snakes ainsi qu'Ellaria se réunissent autour du squelette. Petite citation pour vous situer la position d'Ellaria sur la suite des événements : 

[Obara] gave the skull a mocking kiss. "This is a start, I'll grant".

"A start ?" said Ellaria Sand, incredulous. "Gods forbid. I would it were a finish. Tywin Lannister is dead. So are Robert Baratheon, Amory Lorch, and now Gregor Clegane, all those who had a hand in murdering Elia and her children. [...] Who else is there to kill ? Do Myrcella and Tommen need to die so the shades of Rhaenys and Aegon can be at rest ? Where does it end ?" - A Dance with Dragons, "The Watcher". 

Même après avoir perdu son amant, son amour, Ellaria reste un personnage qui oeuvre pour la paix. Ses rapports avec le prince Doran sont loins d'être aussi remplis de haine. Ainsi, après que les quatre aînées des Sand Snakes prennent le parti de la guerre, on peut lire :

"Ellaria turned to the prince. "I can hear no more of this".

"Go back to your girls Ellaria" the prince told her. 'I swear to you, no harm will come to them"

"My prince." Ellaria kissed him on the brow and took her leave. Areo Hotah was sad to see her go. She is a good woman. " 

Nous sommes donc très loin du débordement de violence, de sang de la série. Mais de plus, nous sommes loin d'un personnage calme, réfléchi et mûr. Dans la série, Ellaria se comporte comme une adolescente en crise, vengeresse jusqu'au plus profond de son être, perfide et loin d'être sympathique. La vengeance appartient aux Sand Snakes, et cela aurait dû être suffisant. La suppression d'un personnage pacificateur donne l'impression que, dans la série, il n'y a pas de place pour un certain entre-deux, il n'y a que la violence qui vaille la peine d'être montrée. 

Il ne s'agit évidemment pas de l'unique scène violente depuis la reprise. Cette violence est devenue une marque de fabrique, un argument de vente, dans Game of Thrones comme dans bien d'autres séries depuis. 

Au départ, c'était quelque chose de légitime utilisé pour rendre compte de l'intrigue et du monde dépeint par GRRM, puis, avec le succès de la série, on succombe à la facilité de la violence pour l'audience, pour choquer un spectateur qui s'habitue, donc on en rajoute, on se tourne vers l'excès, on tue à tout va pour se rassurer et se dire que oui, c'est ce que le public veut. Un rapport malsain s'installe entre les deux. Eux (HBO, les scénaristes, les producteurs), sacrifient sur l'autel de leur orgueil des personnages, des intrigues, de la cohérence pour du spectacle. Nous, nous y laissons en quelque sorte notre morale. Nous sommes des voyeurs avide de l'horreur qui se déroule sur nos écrans, et qui fait toujours débat.

Dans son livre La géopolitique des séries, Dominique Moïsi s'interroge sur cette fascination pour la violence et le sexe dans les séries. Il avance que ce serait notre appréhension du futur qui nous rendrait fascinés par cet univers Moyen-Ageux qui nous renvoi en fait à notre propre situation : NOUS sommes le moyen-âge.  Game of Thrones traduirait le triomphe de la peur sur la raison. 

Selon lui, on pourrait aussi parler d'une forme d'exorcisme : notre immersion dans la violence de la fiction serait un moyen pour nous d'occulter celle de notre monde, un moyen pour nous de dire que rien ne pourra jamais être aussi violent que cela, de toute façon. 

"Alors que nous tournions pudiquement -il serait plus juste de dire lâchement - nos yeux pour ne pas affronter la réalité syrienne, nous sommes littéralement dans un processus de sidération face aux péripéties les plus sanglantes de Game of Thrones. Tout se passe comme si plus nous fermions les yeux sur la réalité de la violence au Moyen-Orient, plus nous les ouvrions sur les violences de la fiction." (page 66)

Un problème de temporalité ? 

En effet, le premier épisode donne le sentiment que pour les personnages, un an s'est également écoulé depuis les événements de la fin de la saison 5, leur permettant un certain recul, comme pour le spectateur...mais ce n'est pas le cas et la saison 6 reprend là où on les avait laissés, causant un certain désarroi et pas mal de frustration. 

Par exemple, Davos, chevalier loyal, vouant un amour inconditionnel à Stannis, sa fille, sa cause...qui oublie tout au profit de Jon Snow. Une dévotion admirable pour celui que Stannis respectait, mais un petit rappel de tout ce qu'il a perdu aurait été sympathique. Cependant, force est de reconnaître que, lors du premier épisode, les scènes se déroulant au Mur, avec la forte présence de ser Davos qui avait jusque là été sous-exploité ont été les plus agréables à suivre. Peut-être que le seul point positif de la mort prématurée de Stannis dans la série est que cela aura permis de laisser le champ libre à son meilleur conseiller et ami. 

Au delà de ça, on peut se demander à quoi jouent les scénaristes. Ramsey est un monstre sans coeur, alors pourquoi nous laisser croire qu'il pourrait éprouver du chagrin (même si cela es temporaire) pour quelqu'un ? Cela va dans la continuité du problème posé par le fait de lui avoir donné une "relation" stable. Ce qui est particulièrement gênant, c'est qu'il semble avoir plus de temps pour faire son deuil qu'un personnage au coeur grand et loyal comme Davo. Une humanisation gênante d'un personnage qui est loin d'être humain. Cela sera rattrapé par les événements du deuxième épisode : le meurtre de son père, même si loin d'être canon dans les livres, semble logique et toutes les scènes entre Roose et Ramsey semblaient tendre vers cet instant. Encore une fois, on assiste à un déversement de violence, mais ici, cela correspond au personnage et sa ligne de conduite, et permet de rappeler qui est VRAIMENT Ramsey.

Ensuite, nous avons parlé un peu plus haut du fait que Jaime fait du sur-place, mais Daenerys repart en arrière. Sa storyline est conforme aux livres, mais dans les deux cas, sa situation est très frustrante quant à l'évolution du parcours de la Mère des Dragons. Est-ce que cela serait un moyen de nous signifier son échec inévitable ? Dans les livres, cela serait probable. Mais comme c'est un personnage bien aimé et toujours mis en avant dans la série, le doute est permis...

Mais elle n'est pas la seule à bénéficier d'un traitement de faveur. Le public adore Tyrion, certes, mais les scénaristes de la série également au point que la place donnée au nain dans la série commence à friser le ridicule. Wahoo, il boit et il fait des blagues, il rend visite à des dragons qui ne laissent même pas leur Mère approcher et réussit à être toujours le plus intelligent et à tout réussir. Où est le Tyrion alcoolique, détruit, dépressif des livres ? Celui qui est loin de vivre sereinement à Meereen, celui qui est vendu comme esclave, qui endure épreuves après épreuves. Pourquoi lui simplifier la tâche à ce point quand on la rend si difficile à des personnages comme Sansa et Theon ? Cela donne un goût amer d'injustice. On ne peut pas vraiment apprécier sa storyline sans penser à ce qu'elle aurait dû être et sans se demander POURQUOI. Le gros point positif est la présence de Varys a ses côtés : leur relation est l'une des plus intéressantes. Il serait donc agréable que la présence de l'eunuque ne soit pas juste un prétexte pour des blagues mais qu'il ait vraiment son rôle à jouer dans la survie de Meereen. 

Pendant ce temps là, Arya fait du sur-place, on nous fait la promesse d'un arc consacré aux îles de Fer ( en espérant qu'il ne connaisse pas le même sort que Dorne), et Bran revient pour nous donner des visions du passé et du futur. La première était très alléchante, mais pas autant que celle de la semaine prochaine : la tour de la joie, où, avec un peu de chance, nous apprendrons l'identité des parents de Jon Snow. 

Le cas Sansa Stark  le personnage le plus maltraité par la série

Rappelons qu'au lieu de gambader dans la neige avec Theon, Sansa devrait se trouver dans le Val d'Arryn, a apprendre, en sécurité, à jouer le jeu des trônes, à devenir une femme influente qui comprend la politique de Westeros grâce à son "mentor" Littlefinger. Elle vit un temps d'apaisement sous l'identité d'Alayne Stone, bâtarde de Petyr Baelish. 

Ici, après avoir passé une saison 4 a devenir une jeune femme sûre d'elle , Sansa avait été renvoyée d'un gros coup de pied à son statut de victime (ce que beaucoup de spectateurs lui reprochent d'ailleurs...mais c'est un autre débat et si vous faîtes parti de ces gens là, remettez vous un peu en question) en se voyant mariée à l'infâme Ramsey Snow (violée, battue, menacée...bref, un King's Landing bis). 

En plus de rabaisser le personnage, cela a également pour conséquence de ne plus faire de Winterfell un lieu sûr, un refuge possible, une maison pour Sansa, mais bien un énième lieu de torture souillé par les perfidies des Bolton. Pourquoi alors devrait-elle chercher à y retourner ? Même si les Bolton déguerpissent, cela n'enlèvera pas ce qu'elle a subi en ces lieux. Cependant, je ne pense pas que les scénaristes l'entendent de cette oreille. Ainsi même si j'adorerais revoir Sansa à Winterfell, ce ne serait pas vraiment logique. 

Après avoir repris du poil de la bête, Sansa se retrouve de nouveau dépendante de quelqu'un : Theon. Puis, Brienne, qui arrive miraculeusement au moment opportun, sortie de nul part après avoir dévié de sa mission pour aller oxir le traître Baratheon qui avait tué son amour de toujours. Bon, maintenant que c'est fait, peut-être cela aura t-il pour conséquence de la faire se concentrer sur sa mission. Même si cette arrivée est trop fortuite pour être crédible,  elle donne quand même lieu à une belle scène où l'écho de Catelyn Stark est plus présent que jamais (mais quand cessera t-elle d'être un écho pour enfin avoir la storyline qu'elle mérite ?), quand Brienne entre officiellement au service de Sansa. 

Many happy returns : Jon Snow

Honnêtement, qui ne s'y attendait pas ? Déjà, après avoir fini de lire le dernier livre, le sentiment persistait : Jon Snow reviendrait. Peut-être que s'il n'y avait pas eu les différents commentaires de la chaîne, des acteurs, tout les jours pour insister sur la mort du lord Commandant de la Garde de Nuit, on aurait pu y croire. Les gars sont pas doués en marketing. 

En soi, je ne critiquerais pas le fait qu'ils le fassent revenir, car je pense que c'est ce que GRRM a prévu pour ce personnage. C'est plutôt la façon de procéder qui coince. Mélisandre, qui a perdu la foi, qui ne croit plus en son dieu, en ses pouvoirs, pourrait le faire revenir du premier coup ? Même la mise en place d'une tension inutile ne permet pas de rendre cette fin de deuxième épisode moins prévisible. Mais cela donne quand même hâte de voir la suite, même si ce sentiment de facilité s'insinue en nous, la curiosité l'emporte. 

(Quitte à faire revenir Jon Snow, pourquoi ne pas avoir donné sa chance à Lady Coeurdepierre ? Quand même...) 

Comme toujours donc, la série multiplie les points négatifs, toujours compensés par notre attachement aux personnages, aux acteurs, au monde de Westeros...Il serait quand même judicieux d'essayer de maintenir un certain cap et d'arrêter de céder aux facilités sous prétexte de vendre du spectaculaire. Il est encore possible d'établir des comparaisons avec les livres par le biais des personnages (ce que j'ai fait), mais maintenant les défauts et les facilités de la série sont percevables hors de la question de l'adaptation, et cela devient donc beaucoup plus gênant. Il y aurait encore beaucoup a dire, certains points ont ici été abordés très rapidement mais le tout est déjà assez long comme ça...Faîtes moi parvenir vos corbeaux si vous avez besoin de précisions !